Un dernier coup de raquette avant le changement.

Du vendredi 23 au dimanche 25 novembre, le stade Pierre Mauroy accueille la finale de la Coupe Davis. Français et Croates s’y affrontent pour remporter le 107ème saladier d’argent de l’histoire. Pour le 108ème, ce sera une autre histoire : La Coupe Davis va changer de formule. Circonflex Mag vous explique les nouveautés et ce que le monde de la petite balle jaune en pense.

« La Coupe Davis est morte ». Arnaud Clément, ancien capitaine de l’équipe de France de tennis, et vainqueur en tant que joueur en 2001, réagit à l’annonce de la Fédération Internationale de Tennis (IFT) : au mois d’août 2018, ses membres ont voté pour l’adoption d’une Coupe Davis nouvelle formule.  Alors, quésako ?

Depuis 118 ans, la Coupe Davis est un format de compétition échelonné sur un an, avec 4 week-end retenus. Les matchs se déroulent sur 3 jours avec des stages de préparation en amont (généralement une semaine). Les joueurs profitent d’une sorte de « trêve internationale », durant laquelle aucune compétition majeure n’est organisée. Mais certaines pointures du tennis mondial, Novak Djokovic, Roger Federer ou Rafael Nadal « ne veulent plus y consacrer du temps », comme l’explique le président de la Fédération Française de Tennis (FFT), Bernard Giudicelli. Alors ce dernier a contribué à l’évolution de cette compétition en votant pour le changement.

Une nouvelle formule plus condensée.

La nouvelle formule de le Coupe Davis est plus condensée : 18 équipes sur une seule semaine. Chaque confrontation ne se disputera plus sur 3 jours mais sur un seul. Il a donc fallu modifier la durée des matchs, 2 sets gagnants au lieu de 3, ainsi que le nombre de rencontres jouées. Jusqu’à présent, on disputait 2 simples  le premier jour, un double le samedi et deux autres simples le dimanche. A partir de 2019, les équipes ne s’affronteront plus que lors de 2 matchs en simple et un match en double. Pour Bernard Giudicelli, toutes ces modifications n’auront pas de conséquences sur le nombre de spectateurs.

Vendre l’âme de la Coupe Davis.

Mais du côté des sportifs, on tient un tout autre discours : de nombreux joueurs et entraineurs français ont fait part de leur mécontentement. Patrice Hagelauer, entraineur de l’équipe nationale pendant 21 ans, déplore qu’il n’y ait plus de matchs à domicile : « C’est quand même ça, le grand intérêt de la Coupe Davis. Pendant 3 jours, c’était la fête. Là, je pense que très peu de gens vont se déplacer à l’étranger pour voir l’équipe de France. » Yannick Noah, actuel entraineur des joueurs français, ne cache pas son amertume : « Honte à tous ceux, joueurs, dirigeants et médias qui viennent de vendre l’âme de la Coupe Davis. » Il trouve cette décision « scandaleuse » et le 16 août 2018 était pour lui « un triste jour pour le tennis français. »

118 années d’histoire balayées grâce à quelques billets.

Nicolas Mahut, présent lors de la victoire française en 2017, estime que « la Coupe Davis est morte et une partie de l’histoire de notre sport envolée pour une poignée de dollars. » Il n’est pas le seul à mettre en lien changement et argent. Steve Darcis, joueur belge et finaliste en 2015 et 2017, est d’accord : « 118 années d’histoire balayées à cause de quelques billets. » En effet, pour financer cette nouvelle forme de compétition, la fédération internationale a signé un partenariat avec le groupe d’investissement Kosmos géré par le joueur de foot du Barca Gerard Piqué. Ce dernier s’est pris une petite pique par Todd Woodbridge, ancien tennisman australien et vainqueur à deux reprises du saladier d’argent : « Un footballeur se retrouve sur scène à l’assemblée générale de l’ITF pour nous dire que la Coupe Davis doit changer mais les légendes de ce sport, qui pour la plupart ne sont pas d’accord, n’y sont pas. »

Les supporters en noirs

La jeune génération de tennismen a le même avis que ses ainés. Félix Auger Aliassime, joueur canadien de 18 ans explique que « son plus grand rêve d’enfant, c’était de jouer une finale de Coupe Davis devant son public. »

Ne m’appelez plus jamais la Coupe Davis.

Les joueurs réticents peuvent également compter sur leurs supporters. Pendant le double de la demi-finale France-Espagne début septembre, les supporters membres de l’association Aseft, habituellement vêtus de bleu, portaient des tee-shirts noirs. Une façon de montrer leur mécontentement vis-à-vis du changement prévu pour 2019. Ils ont déplié un dessin de la tombe de la Coupe Davis ainsi qu’un autre qui montrait une main tenant des dollars cassant le saladier d’argent. Ces supporters ont également détourné la chanson Le France de Michel Sardou en entonnant : « Ne m’appelez plus jamais la Coupe Davis, la France m’a laissée tomber… ».

En attendant la nouvelle formule, ne boudons pas notre plaisir : la France est en finale, ça se passe chez nous, à Lille, profitons-en pour aller supporter notre équipe ! Et comme l’a dit Lucas Pouille, « essayons de garder la Coupe à la maison ! ».

Amélie Desjuzeur